Est-ce que le devoir conjugal existe toujours ?

par Emilie CARTIER pour TF1 INFO
Publié le 17 avril 2024 à 19h00

Source : Bonjour !

Le terme de "devoir conjugal" désigne l’obligation d’avoir des relations sexuelles entre époux.
Encore aujourd’hui, la question du devoir conjugal reste épineuse et soulève bien des débats tant du côté des juristes que des associations féministes.
Parce que le mariage ne doit pas être considéré comme une servitude sexuelle, le consentement entre époux reste indispensable.

33 % des femmes interrogées reconnaissent avoir déjà accepté une relation sexuelle sans en avoir envie. Le résultat de l’enquête réalisée en 2023 par le Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes montre à quel point la dette sexuelle est répandue. Elle concerne les deux sexes et fait écho à la notion de devoir conjugal. 

Est-ce le devoir conjugal est inscrit dans la loi ?

Sans être explicitement mentionnée par la loi, l’obligation de rapports sexuels entre époux existe au regard de la jurisprudence. Vous ne trouverez aucune trace du devoir conjugal dans le Code civil. Ce "devoir" est considéré comme un anachronisme juridique, car il découle d’une interprétation ancienne, par les juges civils, de l’article 212 du Code civil qui les soumet à une obligation de "fidélité" et de l’article 215 qui oblige les époux à une "communauté de vie". Celle-ci impliquerait une communauté de toit, mais aussi de lit.  Dans le cadre d’un PACS, il n’existe aucun devoir conjugal ou obligation de fidélité. 

L’abstinence sexuelle, un motif de divorce ?

Le divorce pour faute peut être demandé par l’un des époux "lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune" (article 242 du Code civil).  La jurisprudence mentionne l’absence de relations sexuelles entre époux comme une faute au même titre que les violences conjugales, l’abandon de domicile et l’adultère. Elle peut faire l’objet de dommages et intérêts. 

Certains juristes dénoncent cette situation. Parmi eux, Anne-Marie de Cayeux, avocate à Paris, plaide pour la suppression de cette faute, estimant que la liberté sexuelle et le droit de disposer de son corps restent des droits fondamentaux qui ne souffrent d’aucune limitation ni exception. 

L’importance du consentement entre époux

Au cœur des sujets de société, la notion de consentement reste liée à celle du devoir conjugal. Le viol entre conjoints est interdit. L’article 222-2 alinéa 2 du Code pénal énonce que "les viols et les autres agressions sexuelles sont constituées […] quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage".  

Depuis 1980, le viol entre époux est considéré comme une circonstance aggravante et la peine encourue est de 20 ans de réclusion criminelle. Mais faute de preuves, les plaintes sont généralement classées sans suite. Comme le rapporte une étude de l’Institut des politiques publiques publiée le 3 avril 2024, 86 % des signalements pour violences sexuelles et conjugales ayant eu lieu entre 2012 et 2021 (environ un million) n’ont pas abouti. 


Emilie CARTIER pour TF1 INFO

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